III) Japon- Chine: concurrences régionales, ambitions mondiales
A) Concurrences régionales
(BO=) Le Japon et la Chine constituent les deux pôles principaux d’Asie orientale. Mais leur influence dans la région s’exprime de manière différente.
Le Japon reste le pays d’Asie orientale le plus riche, le plus développé, le plus avancé technologiquement. Il en est aussi toujours le principal investisseur et bailleur de fonds. La puissance de la Chine s’appuie sur des éléments plus diversifiés : outre une puissance économique importante et croissante (très forte production, capacité financière de plus en plus affirmée), la Chine dispose aussi d’autres atouts (force militaire, réseaux des Chinois d’outre-mer, ressources naturelles, présence forte dans les espaces maritimes régionaux ...). Dans la rivalité ancienne qui oppose ces deux puissances majeures de la région, la Chine semble aujourd’hui de plus en plus susceptible de l’emporter et d’établir sa domination en Asie orientale aux dépens du Japon.
En 2010, la Chine a dépassé le Japon en qualité de 2nde économie du monde, statut de n°2 auquel la mise en place du concept de Triade nous avait « habitué » depuis sa création en 1985 par l'économiste
- Si une observation superficielle du tandem sino-japonais donne l'image de deux puissances rivales, l'une du géant régional chinois, première usine du monde, l'autre du maître es-robotique et technologies de pointe japonais, la diversité et la complexité des relations sino- japonaise dépassent la simple évocation de l'écart de PIB investit dans la recherche et développement (3,6% du PIB japonais contre 1,5% pour la Chine), qui pourrait entretenir le cliché.Le Japon et la Chine constituent les deux pôles principaux d'Asie orientale. Le PIB japonais (5 400 Mds de $) additionné au PIB chinois (5 750 Mds de $) représentent 68% du PIB asiatique. Chine et Japon dominent 63% du commerce extérieur du continent asiatique.
- Le Japon et la Chine sont devenus au cours des dernières décennies des partenaires commerciaux privilégiés. Entre 1972 et 2011, les échanges entre les deux pays ont été multipliés par 300. La Chine est devenue le premier partenaire commercial du Japon, en tant que atelier de celui-ci, grâce à la logique du vol d'oies sauvage: la Chine attire les délocalisations japonaises vers ses entreprises de sous-traitance. Ainsi, la Chine représente 20% des échanges extérieurs japonais. Mais ces relations ne peuvent être considérées comme asymétriques, car l'essor chinois profite également au Japon. En effet, le Japon est le troisième client (8%) et le premier fournisseur de la Chine (13%). Le Japon est le 1er détenteur d'IDE en Chine.Enfin, les flux de personnes s'intensifient entre les deux pays. Phénomène particulièrement récent, on dénombre aujourd'hui 500 000 Chinois sur le sol japonais, notamment des étudiants venus compléter leurs études, et des expatriés de FTN chinoises. En retour, 127 000 Japonais sont présents en Chine, dont 50 000 pour la seule capitale économique, Shanghai.
- Néanmoins, les relations sino-japonaises n'en sont pas moins antagonistes, du fait d'une histoire parsemée de tensions et de crises: traités inégaux, guerres sino-japonaise (ex.: 1931-1945) au sujet desquelles le Japon refuse de reconnaître ses crimes de guerre. Le rétablissement des relations diplomatiques ne date que de 1972. Les tensions sont régulièrement ravivées notamment au sujet des frontières maritimes: revendications chinoises des îles de Diaoyutai(en chinois)/Senkaku(en japonais) illustrent ces rivalités, comme les accrochages entre pêcheurs chinois et garde-côtes japonais.Enfin, les deux pays ne semblent pas prêts pour une collaboration pleine et entière pour mettre en place une zone de libre-échange, malgré les réguliers entretiens à ce sujet. La Chine limite en Asie orientale cette coopération à l'ASEAN+3, tout en maintenant la construction de l'Organisation de coopération de Shanghai avec la Russie et les États d'Asie centrale. De son côté, le Japon veut élargir l'ASEAN+3 à l'ASEAN+6, soit en y intégrant l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Inde, renforçant ainsi le poids philo-« occidental » (c'est mon interprétation!).
B) Ambitions mondiales
(BO=) Depuis le XIXème siècle, le Japon et la Chine exercent également une influence à l’échelle mondiale (ce qui peut être rappelé en établissant un lien avec la question d’histoire consacrée à la Chine et au monde depuis le mouvement du 4 mai 1919). Là encore, ces deux pays ne disposent toutefois pas des mêmes outils au service de cette puissance. Le statut du Japon dans le monde est essentiellement celui d’une grande puissance économique, acteur-clé des échanges mondiaux. L’influence chinoise sur le monde est plus polymorphe : elle s’appuie aussi sur le poids démographique, l’influence diplomatique, la capacité militaire, la représentation dans les grandes organisations internationales ce qui confère par ailleurs à la Chine une place
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tout à fait particulière au sein des pays dits émergents.
- La Chine et le Japon sont respectivement les 2e et 3e puissances économiques du monde. A eux deux, ils cumulent 18% du PIB mondial; soit 5760 Mds de $. Si la Chine maintient ses taux de croissance autour de 10%, le Japon stagne autour de 3%, après une longue décennie de crise.Chine et Japon s'imposent comme des puissances commerciales de dimension mondiale: la Chine est le 1er exportateur mondial (1 500 Mds de $, soit 10% des exportations mondiales), soit le double du Japon ( 765 Mds de $, 5%). Cela permet aux deux pays de posséder un remarquable excédent commercial, qui en font deux investisseurs à l'étranger de poids, comme l'illustre le fait que la Chine soit le premier détenteur de la dette des États-Unis.
- Longtemps considérés comme des « nains politiques », la Chine et le Japon mènent une politique active sur l'échiquier politique international, afin de tourner la page de décennies de retrait: cf→ défaite japonaise de 1945, et mise sous tutelle militaire étatsunienne (voir: bases militaires des EU sur le sol japonais, notamment en bais de Tokyo et à Okinawa); Chine refermée sur elle-même de 1949 à 1978, bien que possédant depuis 1945 un siège permanent au Conseil de Sécurité de l'ONU (attention, prendre le soin de rappeler que le siège était à Taïwan de 1949 à 1971, pour faire le lien avec le chapitre d'Histoire ad hoc).
- Ainsi, c'est notamment par la mise en place d'un softpower que chacun tente de valoriser son image à l'internationale. Si la Japon est en pointe à ce sujet par l'intermédiaire du « Cool Japan », mangas, films, mode, cuisine, qui en fait un des premiers exportateurs de produits culturels au monde (« Kakoï desu », prononcer « Kakoï dess »= c'est mignon), la Chine n'en est pas en reste pour autant, comme l'ont illustré les JO dePékin, Expo U de Shanghai. D'ailleurs, la Chine promeut la diffusion de la langue par le développement des instituts Confucius à travers le monde. La Chine peut également miser sur sa « botte secrète », l'importante diaspora chinoise à travers le monde, diaspora qui entretient des liens étroits avec sa terre d'origine (ex.: ces derniers valorisent, autant que faire se peut, la production de leur pays d'origine, voire de leur contrée, production qui est ensuite vendue dans les multiples boutiques chinoises à travers le monde (une mondialisation régulée???).
Néanmoins, tant Chine que Japon aspire à un poids militaire renforcé: l'armée japonaise, bien que constitutionnellement de défense, est la 6e du monde, et intervient notamment en soutien logistique, comme aux côtés des EU en Irak en 2003. La Chine, quant à elle, possède la 1e du monde en effectif, mais ne cesse de se moderniser: 2e budget au monde (114 Mds de $)!
Il reste que le jeu diplomatique est verrouillé, du fait que seule la Chine est Membre du conseil de sécurité.
Conclusion: Exceptionnel laboratoire du devenir des relations internationales, de l'organisation politique, sociale, culturelle, etc. des États, l'Asie n'en finit pas de surprendre les observateurs internationaux, par ses multiples capacités à retrouver un poids mondial, peu ou prou perdu au tournant XIXe siècle-fin de la Seconde Guerre mondiale. Néanmoins, les handicaps internes restent nombreux, voire inquiétants pour l'avenir d'une humanité de plus en plus nombreuses, sur une planète plus ou moins exploitée à saturation. Ce qui n'empêche en rien (Ah! La finance prend tant de hauteur) le progressif recentrage de l'économie-monde sur le Pacifique, comme le pense et le prépare Barack Obama depuis son
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1er mandat en 2008.